Acteurs Jardinier : Julie Rodriguez

Fonction Jardinière

Entité Potager du Roi

Arrivée au Potager du Roi en 2009, Julie Rodriguez est responsable de l'arboriculture fruitière. Propos recueillis par Antoine Jacobsohn.

Quel est ton premier souvenir du Potager du Roi ?

La première fois que j'en ai entendu parler, c'était pendant un de mes stages à Savigny-le-Temple, en Seine-et-Marne, lors d'une cueillette avec trois de mes camarades de classe du Lycée horticole de Montreuil. C'est marrant, j'ai réalisé plusieurs étés au Potager du Roi mais mon premier souvenir marquant c'est plus tard, quand je suis venue avec ma classe de spécialisation « Technique du végétal » à l'École Du Breuil, devenue aujourd'hui une licence professionnelle. Nous étions venus pour une journée de taille et je suis la seule qui a tenu toute la journée. Je me souviens d'être sur un escabeau au quatrième des Onze et d'entendre Jacques Beccaletto me dire « accroche-toi à la ferrure », ce que j'ai fait pendant qu'il approchait l'escabeau pour que je puisse continuer de tailler. C'était chouette que les jardiniers nous fassent confiance pour tailler leurs arbres. C'est l'arboriculture fruitière qui m'avait le plus plu et ce n'était qu'une initiation.

À la fin de l'année, j'ai reçu une lettre de toi pour postuler à un poste en arboriculture. Je l'ai fait et je suis là depuis 2009. Et je ne suis pas encore partie.

Est-ce que tu as un endroit préféré dans le jardin ?

Ce n'est pas le 4e des Onze. Pendant longtemps c'était le carré cinq du Grand Carré, avec tous les petits carrés d'herbes aromatiques.

Mais en fait, je n'ai pas d'endroit préféré, c'est l'ensemble. Il y a l'arboriculture, mais c'est l'ensemble. C'est les saisons, c'est des lumières, c'est des moments. J'aime le jardin le matin, par exemple quand je travaille les week-end, le matin, c'est calme quand le soleil se lève. Oui, ce n'est pas un endroit, mais des moments, des ambiances.

Pourquoi es-tu devenue jardinière ?

L'école et moi, nous n'avons jamais été amies. En France, il y a ce truc de la voie royale. J'ai fait le choix d'aller en seconde générale car mon prof principal présentait la voie des BEP comme une voie "de garage". Personne ne choisit de finir dans une voie dite "de garage". J'ai finalement choisi cette voie deux ans plus tard, car je voulais travailler dehors et j'ai trouvé le Lycée départemental d'horticulture de Montreuil. Ils m'ont acceptée en production horticole et légumière, sinon ça aurait été l'armée. C'est à partir de là que j'ai pu me réconcilier avec l'école qui m'a menée là où je suis actuellement. J'ai retrouvé le plaisir, j'ai retrouvé le goût d'apprendre. Mes amis et mes enseignants, quand ils me revoient, me disent qu'ils ne sont pas surpris que je sois devenue jardinière. Moi je leur dis qu'ils auraient pu me le dire plus tôt, j'aurais peut-être moins galéré.

Est-ce qu'il y a un geste de jardinier ou un outil que tu préfères aux autres ?

La taille, le sécateur, parce que c'est le cœur de mon métier. Mais, peut-être, tout simplement, mon outil préféré c'est les mains.

Tu es la jardinière qui fait des blagues aux autres.

Oui, j'aime jouer. Il y a beaucoup de choses très sérieuses dans la vie, et jouer, rire, c'est une manière de désamorcer les choses compliquées. Je peux paraître comme n'étant pas sérieuse, mais sur le fond, je le suis. Ça ne m'empêche pas de nouer les lacets de mes collègues quand ils laissent trainer leurs chaussures.

Je fais aussi des choses drôles avec mes vêtements et mes affaires, je les personnalise en y intégrant des broderies, du tricot et des dessins. Mon rêve, c'est que chaque escabeau de l'équipe arboriculture soit peint d'une seule couleur : rouge, orange, bleu... nous serions alors un arc-en-ciel dans le jardin.

Tu fais des blagues mais tu t'impliques beaucoup.

Je fais partie des chanceux qui font un métier qu'ils aiment. Mes parents ont fait des métiers par obligation. Je viens d'Aubervilliers, de Drancy, des quartiers de béton. Je trainais dehors. C'est peut-être pour ça que je n'aime pas les a priori sur les origines des gens. Je suis sortie du 93 pour travailler et habiter à Versailles. Il faut toujours rester ouvert d'esprit. Nous recevons parfois des personnes en TIG (Travaux d'Intérêt Général). On a tous le droit à une seconde chance.

Le jardin, c'est quelque chose de simple et on a envie de le partager. En ce début d'après-midi maussade, nous, l'équipe arboriculture, avons croisé une élève de première année de formation au Diplôme d'État de Paysagiste. Elle nous a invités à venir voir leur rendu d'atelier 2. Ma collègue Isabelle nous a proposé de passer par leurs ateliers pour rejoindre le jardin Lelieur où nous travaillons actuellement. Je ne comprends pas tout, mais j'ai vu la quantité de travail et le temps qu'ils y ont passé. Et, Antoine, est-ce que tu ne voudrais pas qu'on ait un Carlin ?

C'est quoi un carlin ?

C'est une race de chien avec un corps athlétique, un concentré de muscles, une endurance à toutes épreuves. Il pourrait tirer les remorques quand les engins sont en panne et devenir notre mascotte...

Publications