Publications Article : Jour 19 - Bois sacré, Bomarzo, Italie
Un jour, un jardin
Publié le
Réalisé par le condottière Pierfrancesco II Orsini (1523-1585) en hommage à sa femme Giulia Farnese, disparue très jeune, ce bois-jardin a probablement été conçu autour de 1550 par Pirro Ligorio (l’attribution n’est pas certaine), architecte et antiquaire réputé, à l’époque engagé aussi dans les fouilles de la Villa d’Hadrien et de la construction de la Villa d’Este.
La composition s’articule autour des sentiers sinueux parfois escarpés qui s’enchevêtrent sous les ombrages d’un bois de chênes de 3 ha. Des architectures bizarres (une maison perchée, un théâtre en ruine, un temple, une tour …) et des grotesques souvent démesurés (des géants, des sphinx, des dauphins, une sirène, un dragon, un éléphant, etc…) ponctuent le parcours. Parfois, elles sont décorées par de mystérieuses inscriptions, comme l’invitation gravée sur une banquette étrusque au milieu du bois : « Vous qui allez errants par le monde. Pour contempler de hautes et stupéfiantes merveilles. Venez ici ! Vous y trouverez des faces terribles. Éléphants, lions, ours, ogres et dragons. » C’est toute l’ambiance du Sacro Bosco (« sacré » dans le sens de fabuleux), au sujet duquel les historiens et les philologues rivalisent d’interprétations. En effet, si l’iconographie s’inscrit bien dans celle de la fin de la Renaissance, avec son imaginaire issu des Métamorphoses d’Ovide, la composition du jardin, sans perspectives ni orthogonalité, et sans aucun rapport d’échelle entre les sculptures, reste inédite.
La disposition actuelle n’est pas tout à fait celle d’origine, elle remonte au XXe siècle, quand le lieu est progressivement réaménagé et intéresse nombre d’artistes, tels Brassaï, Dalí, Antonioni. Niki de Saint Phalle s’en inspire pour son Jardin des Tarots, à Capalbio, en Toscane.